Le samedi, c’est évidemment partout le jour de marché, et partout, le jour où l’on se retrouve pour palabrer. « Il faut venir au Rialto le samedi, c’est le jour le plus beau » dit-on ici. C’est vrai, même si le marché a lieu tous les jours de la semaine sauf le lundi, en cette matinée du samedi, l’atmosphère est délicieuse. Tout le monde y va, faire les courses de la semaine, chacun a son maraîcher, ou son poissonnier de confiance, les uns préferont « la Daniela », d’autres « les jumeaux », d’autres encore « Marco ». On y achète aussi des brassées de fleurs.
Les mouettes sont là, postées directement sur l’auvent de l’étal qui jouxte les arcades du marché au poisson, qu’elles lorgnent, conscientes que chacun est bien trop occupé à choisir entre les sardines, la morue, les bars, les seiches, les crabes, les cigales de mer, les poulpes, les palourdes, les moules, pour lever le nez et voir leur oeil avide. Quand vers une treize heures, les têtes de poisson seront jetées, ce sera une guerre des plus bruyantes entre ces oiseaux qu’on ne peut qualifier de farouches.
On se rencontre au Rialto le samedi matin, on se donne des nouvelles du petit, autour de la poussette, on exhorte le plus grand à cesser de courir partout, on parle de l’expo qui s’est ouverte hier, de celle qui est programmée demain, de la mamma nonagénaire qui n’est pas certaine de vouloir se rendre jusqu’à Naples pour le mariage de sa petite fille. Et surtout, une fois les courses faites, les paniers à roulettes remplis, on va prendre un café, Al Doge, un peu plus, loin, ou bien, plus sûrement, un verre de blanc et trois cichetti, à l’Arco ou bien encore au Marcà, debout bien sûr, dans la calle, ou sur le campo qui donne sur le grand canal. En groupes, à géométries variables, quatre, six, douze…C’est la récompense assurée après les courses, et puis il faut se donner du courage pour grimper et descendre les ponts avec le panier à roulettes.
Le samedi au Rialto, vous êtes vraiment à Venise.